En alignant sa politique sur celle du Maroc dans le dossier du Sahara occidental, la France bouleverse les équilibres géopolitiques et provoque une crise sans précédent avec l’Algérie.
Le vent du changement souffle sur les relations internationales, et la France vient de faire une déclaration de poids en choisissant officiellement de soutenir le Maroc dans le conflit du Sahara occidental. Un soutien qui marque un tournant décisif dans la politique étrangère française en Afrique du Nord, provoquant une onde de choc ressentie jusqu’à Alger.
Dans une lettre adressée au roi Mohammed VI, rendue publique le 30 juillet, Emmanuel Macron a affirmé que la France considère désormais le plan d’autonomie marocain pour le Sahara occidental comme « la seule base » pour une résolution politique du conflit. Une décision qui s’inscrit dans une dynamique de rapprochement entre Paris et Rabat, mais qui compromet gravement les relations avec l’Algérie, fervent soutien des indépendantistes sahraouis.
Une Position qui Redistribue les Cartes Diplomatiques
Le choix de la France de s’aligner sur la position marocaine n’est pas anodin. Il s’inscrit dans un contexte géopolitique complexe où chaque geste, chaque déclaration, résonne bien au-delà des frontières concernées. Ce soutien explicite de Paris au plan marocain, qui propose une large autonomie pour le Sahara occidental tout en restant sous souveraineté marocaine, redessine les alliances et exacerbe les tensions dans une région déjà en proie à de profonds clivages.
Pour l’Algérie, ce positionnement de la France représente une trahison et une provocation directe. En réponse, Alger n’a pas tardé à rappeler son ambassadeur à Paris, un geste lourd de sens qui pourrait être le prélude à une rupture diplomatique plus profonde. La visite d’État du président algérien Abdelmadjid Tebboune à Paris, prévue pour la fin septembre, est désormais sérieusement menacée, jetant un voile d’incertitude sur l’avenir des relations franco-algériennes.
Un Conflit aux Racines Profondes
Le dossier du Sahara occidental est l’un des plus anciens et des plus épineux de la scène internationale. Depuis le retrait de l’Espagne en 1976, ce territoire désertique, mais stratégiquement et économiquement important, est le théâtre d’un conflit gelé entre le Maroc et le Front Polisario, soutenu par l’Algérie. Le Maroc contrôle aujourd’hui environ 80 % du territoire, qu’il considère comme une partie intégrante de son royaume, tandis que les rebelles sahraouis continuent de réclamer l’indépendance.
La communauté internationale, et notamment l’ONU, n’a pas réussi à imposer de solution durable, malgré la proposition d’un référendum d’autodétermination jamais mis en œuvre. Ce statu quo, maintenu depuis des décennies, est désormais remis en cause par le soutien grandissant au plan d’autonomie marocain, notamment de la part des États-Unis, de l’Allemagne, et maintenant de la France.
Rabat Renforce ses Alliances, Alger s’isole
La diplomatie marocaine, sous l’impulsion du roi Mohammed VI, a été particulièrement active ces dernières années pour rallier des soutiens à sa cause. En 2020, la reconnaissance par les États-Unis de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental, en échange de la normalisation des relations avec Israël, a marqué un tournant. Depuis, Rabat n’a cessé de consolider ses positions, convainquant l’Allemagne, les Pays-Bas, et maintenant la France, d’adopter une vision similaire.
Cette réussite diplomatique du Maroc place l’Algérie dans une position délicate. Habituée à un soutien international plus partagé, Alger se retrouve de plus en plus isolée sur la scène diplomatique, un isolement qui pourrait s’aggraver si d’autres puissances européennes emboîtent le pas de Paris. Les retombées de cette nouvelle donne pourraient se traduire par un durcissement de la posture algérienne, rendant toute perspective de dialogue encore plus improbable.
Une Nouvelle Page dans les Relations Franco-Algériennes
Ce changement de cap de la France dans le dossier du Sahara occidental pourrait marquer le début d’une nouvelle ère dans les relations franco-algériennes, caractérisée par une défiance accrue et des tensions exacerbées. Alors que les deux pays tentaient, ces dernières années, de surmonter les blessures du passé et de construire un partenariat sur des bases renouvelées, cette décision vient brouiller les cartes et raviver les anciens ressentiments.
Pour Emmanuel Macron, le pari est risqué. Soutenir Rabat peut renforcer les liens économiques et stratégiques avec un allié clé en Afrique du Nord, mais au prix d’une détérioration durable des relations avec l’Algérie, qui joue un rôle central dans les équilibres régionaux et la lutte contre le terrorisme au Sahel.
En prenant position, la France assume un choix qui redéfinit les rapports de force dans une région cruciale. Ce choix, qui fait écho à une longue tradition de realpolitik, s’accompagne cependant de risques politiques et diplomatiques majeurs, dont les répercussions pourraient se faire sentir bien au-delà des sables du Sahara.
Ainsi, en choisissant de soutenir le Maroc dans cette lutte territoriale, la France a peut-être ouvert une nouvelle page de l’histoire, mais c’est une page dont les mots sont encore incertains, et dont les lignes à venir dépendront des réactions des protagonistes sur la scène internationale.